Eugène Gagnon, pilote de Mosquito…?
***
Le capitaine d’aviation Eugène Gagnon est un illustre inconnu. Toutefois, rares sont les inconnus qui peuvent revendiquer 150 heures de vol de nuit sur un Mosquito.
Le Mosquito, un bimoteur chasseur-bombardier fabriqué par de Havilland, était un des avions alliés parmi les plus prestigieux de la Deuxième Guerre Mondiale. Ses pilotes étaient réputés être les meilleurs au monde.
Aux commandes d’un Mosquito, Eugène Gagnon a effectué 33 missions en territoire ennemi, la plupart de nuit au-dessus des aérodromes allemands. Sa mission était de protéger les bombardiers de la RAF qui se faisaient descendre comme des mouches par la chasse allemande.
Le 27 mars 1945, avec son fidèle navigateur Robert Harris, ils partent poser des fusées éclairantes pour guider les bombardiers anglais qui allaient mouiller des mines dans la rivière Elbe. En cours de route le moteur de tribord commence à vibrer pour finalement s’arrêter. Il devient difficile de maintenir l’altitude. À 4000 pieds, ils décident de larguer les deux réservoirs auxiliaires accrochés sous les ailes. Seul celui de droite décroche. Le deuxième moteur a des ratés à 90 milles de la côte anglaise. À 10 milles de la côte le deuxième réservoir finit par se détacher. Malgré tout, le Mosquito atteint sa base et atterrit sur le ventre. Les deux occupants s’en tirent indemnes. Cette mission permet à Eugène Gagnon de décrocher la Distinguished Flying Cross, une des décorations les plus convoitées dans la confrérie des pilotes.
Les hostilités terminées, l’avenir s’annonçait prometteur. Il voulait demeurer au sein de l’Aviation royale canadienne, mais il fut refusé. Eugène Gagnon était très impliqué dans la communauté de Bromptonville. Il était d’ailleurs le président fondateur de la Jeune Chambre de commerce.
Hélas! le 21 octobre 1947, ce valeureux pilote connaît une fin tragique. Il transportait trois hommes d’affaires américains dans un avion amphibie lorsque l’unique moteur cesse de fonctionner. L’appareil s’écrase dans le bois de Windsor, près de Sherbrooke. Les trois passagers survivent. Après de grandioses funérailles militaires, Eugène Gagnon tombe rapidement dans l’oubli.
Toutes les recherches effectuées à ce jour tendent à démontrer que c’est la toute première fois qu’on honore la mémoire de ce héros inconnu et méconnu. Espérons que la cérémonie d’aujourd’hui aura des suites et contribuera à rendre justice à celui qui, comme de nombreux autres Québécois, s’est porté volontaire pour que nous puissions vivre dans un monde libre.
[Texte de Jacques Gagnon, neveu d’Eugène Gagnon]
***
Ce matin, le 11 novembre 2016, au cimetière Côte-des-Neiges, lors de la commémoration du jour du Souvenir organisée par la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, Eugène Gagnon recevra à titre posthume la médaille de l’Assemblée nationale.