HMCS Athabaskan, 29 avril 1944… le début de l’histoire

Écrit il y a 12 ans…

Voici le récit du naufrage de l’Athabaskan tel que raconté par Yves Dufeil.

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Le récit vient du livre suivant…

1850-1950, Cent ans d’histoires de mer dans la Manche d’Yves Dufeil.

J’ai écrit à monsieur Dufeil et il me permet d’utiliser son texte. Monsieur Dufeil a un site incroyable sur l’histoire de la marine

Les dessins viennent d’une brochure que l’on retrouve sur le site de Parcs Canada…

À l’occasion, je mettrai des hyperliens.

Le chapitre sur l’Athabaskan s’intitule…

ROLL ALONG WAVY NAVY, ROLL ALONG…


29 Avril 1944

Plymouth, 28 avril 1944, sept heures du matin.

« Identification… Identification… »

Là-bas sur la jetée, le signal lumineux du poste de guet sémaphorique interroge les deux ombres de navires qui se profilent à quelques encablures, presque noyées dans l’aube grise.

À bord des navires, on a aussitôt déchiffré le traditionnel signal de reconnaissance et l’un d’eux répond à son tour.

« Destroyers Haida et Athabaskan. »

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Le guetteur accuse réception et à nouveau, les éclairs lumineux du projecteur interrogent.

« Avez-vous des naufragés ou des blessés ? »

« Négatif »

L’accusé de réception vient immédiatement et les deux navires canadiens virent pour s’engager entre les jetées tandis qu’un vieux remorqueur poussif ouvre le filet pare-torpilles en crachant une épaisse volute de fumée noire, lourde de scories.

À faible allure, Haida et Athabaskan remontent maintenant la rivière Devon pour regagner leur poste de mouillage habituel. Sur ses rives, s’éveille une population qui s’acharne à survivre malgré les bombardements répétés de la Luftwaffe dont les ruines que l’on aperçoit en sont le sinistre témoignage.

Ce petit matin blême avec en arrière plan tous ces squelettes de constructions calcinées a quelque chose d’inquiétant. C’est un peu comme si l’on pénétrait dans un univers fantomatique où chaque chose, chaque ruine, évoque le cauchemar d’une guerre qui n’en finit pas. Il est vrai aussi que pour ces équipages qui passent la plupart de leurs nuits en patrouille dans la Manche et qui, comme ce fut le cas voici tout juste deux jours, se heurtent aux forces allemandes dans des accrochages dont la brièveté n’a souvent d’égal que la violence, ces randonnées épuisantes ont tout du cauchemar.

Dans la pâle clarté du soleil timide de cette matinée de printemps, Haida et Athabaskan qui viennent de ravitailler le long du pétrolier qui les attendait, ont maintenant pris leur poste de mouillage sur ces coffres qui leur sont devenus désormais familiers. Cette fois encore, les marins exténués n’auront pas le loisir d’aller à terre, car mouiller en rivière tout en conservant les feux allumés dans la machine ne signifie que trop clairement que ce soir encore, il faudra une fois de plus affronter la mer, l’obscurité et peut-être aussi l’ennemi.

Après un déjeuner frugal, une distribution de courrier amène un peu d’animation à bord des navires puis, c’est à nouveau le silence qui s’installe tandis que les équipages mettent ces quelques heures à profit pour prendre un peu de repos.

destroyers au mouillage 3

Dix sept heures.

La vedette du Haida reconduit à leur bord les deux commandants qui rentrent du briefing au Quartier général avec dans leur sacoche, les ordres de route pour leurs navires. Cette nuit, ce sera la Manche occidentale et plus exactement la côte bretonne avec la protection d’une opération de mouillage de mines.

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John Stubbs

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Harry DeWolf

Cette opération a pour nom de code Hostile 26.

Dix sept heures trente.

Le sifflet du bosco appelle l’équipage à souper. Le temps qui jusqu’à présent s’était écoulé lentement semble soudain accélérer. Tout le navire sort de sa torpeur ; le souper est rapidement expédié et à sept heures moins dix, on rappelle aux postes d’appareillage. Dix minutes plus tard, les hélices des deux destroyers entament leurs premiers tours. Pour tous ces marins dont la plupart n’ont pas 25 ans, une longue nuit de veille commence. Une nuit dont tous ignorent encore ce qu’elle apportera.

Derrière les sillages qui grossissent, l’île Drake s’évanouit dans les dernières lueurs du couchant tandis que le sifflet du maître de manœuvre rappelle aux postes de combat de vérifications.

Profitons de ce moment pour faire un tour rapide des deux bâtiments.

Haida et Athabaskan ainsi que nous l’avons vu, sont deux destroyers. En tous points identiques, ils appartiennent tous deux à la classe des “tribus”. Ce sont des Tribals comme on les baptise dans la Navy.

Bien armés, puissants et rapides, ils sont bien adaptés à la plupart des missions qui leur sont confiées. Côté artillerie, on trouve en avant de la passerelle, deux tourelles doubles de 100 mm, les deux autres étant placées à l’arrière. Sur le rouf arrière sont disposés les affûts quadruples de 40 mm, de redoutables canons anti-aérien à tir rapide. Cet armement est complété par sept mitrailleuses de 12,7 placées pour l’essentiel autour de la passerelle. A tout cela s’ajoutent quatre tubes lance-torpilles. Ces destroyers sont montés par des équipages d’environ 250 hommes chacun qui avant d’être intégrés en escadre, ont subi un entraînement intensif tout au long de dures semaines d’école.

Tous les organes des navires ont été vérifiés. Tout fonctionne, tout va bien. Ordre est donné de rompre des postes de combat et d’obscurcir les feux car la nuit est maintenant tombée. Ce dernier ordre ne souffre aucun manquement. Vus de l’extérieur, les bâtiments ne doivent laisser filtrer aucune lumière, pas même un feu de navigation. Guerre oblige ! Dans les postes et les coursives, l’éclairage blanc fait place à l’éclairage rouge.

À 22 heures, c’est la distribution de chocolat chaud et de sandwiches qui comme à l’accoutumée, est agréablement accueillie. Vingt minutes plus tard, retentit la sirène d’alerte rappelant aux postes de combat.

La nuit tout en étant belle est sombre, d’autant plus que la lune est à présent couchée. Tant mieux aussi, car l’obscurité contribue beaucoup à la protection en ces temps où le radar est encore balbutiant. A bord des deux navires, les hommes du service sécurité commencent leur ronde, inspectant tous les compartiments tranche après tranche, s’assurant que tous les orifices sont bien obturés, toutes les portes étanches fermées et toutes les consignes respectées. Il y va de la survie du bateau et partant de celle de son équipage c’est pourquoi, rares sont les rondes où ils doivent intervenir pour corriger quelque chose. Ce soir d’ailleurs, la ronde de sécurité s’achève sur un laconique

« Rien à signaler ! Tout est OK ! »

Ainsi s’avance la nuit, heure après heure et il semble bien que celle-ci ne sera qu’une nuit de routine de plus car les mouilleurs de mines qui ont achevé leur mission font maintenant route au nord et d’ici une heure, ils seront hors de portée des forces de surface allemandes. Les destroyers pourront alors prendre le chemin de l’Angleterre à leur tour. Mais le hasard va en décider autrement…

On continue le récit demain…

Source du texte : http://www.histomar.net/Manche/htm/selection.htm

Si vous avez des souvenirs de guerre de vos ancêtres que vous souhaitez partager…

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